lundi 4 février 2013

Ex-taulard à New York, il retrouve son aumônier à Lodève

Après plus de vingt-cinq ans en prison, l’Américain Severino Diaz, 77 ans, ex-taulard de Rikers Island, a retrouvé lundi dernier dans les larmes et l’émotion le père Pierre Raphaël, né à Millau, ancien aumônier de l’île-prison de New York et seul homme à ne pas lui avoir tourné le dos.
Casquette sur la tête, Severino Diaz a longuement étreint le père Pierre qui, malgré un début de maladie d’Alzheimer, n’a pas oublié ce prisonnier fétiche qu’il a aidé, guidé, réconforté et, surtout, toujours respecté. "Je l’appelle l’Himalaya. Je le vois comme un vrai montagnard. Il est arrivé en trouvant le bon chemin", affirme l’homme d’église, tellement heureux d’une visite à laquelle il n’avait jamais songé, depuis sa maison de retraite de Lodève (Hérault).
Incriminé dans le meurtre d’un dealer

Cette venue, après vingt-cinq ans de prison et six années de conditionnelle qui ont pris fin en 2012, c’était le cadeau que Diaz voulait absolument (s’)offrir le jour des 83 ans de son "père spirituel". Cet homme de Dieu qui lui a ouvert les bras à son entrée en prison, et l’a aussi accueilli à sa sortie dans la Maison d’Abraham, un centre de réhabilitation créé dans le Bronx par le prêtre aveyronnais.D’origine cubaine, Severino Diaz est arrivé à New York en 1969. Marié, un fils, il s’installe comme barbier. Sa vie est sans histoire jusqu’à ce qu’un témoignage l’incrimine dans le meurtre d’un dealer, tué par arme à feu le 15 décembre 1981 dans un bar. Son tort, explique-t-il : avoir été au mauvais endroit au mauvais moment.
"J’ai perdu la foi. Ma vie était vide"
On l’incite alors à plaider coupable, en lui promettant qu’il ne prendra qu’une courte peine. Clamant son innocence, il refuse et est condamné à 15 ans de prison. Direction Rikers. "Quand tous mes recours ont été épuisés, j’ai réalisé que j’allais faire 15 ans. J’ai perdu la foi. Ma vie était vide. J’étais devenu un morceau de viande dans une boîte de conserve", raconte cet homme qui a repris le fil de sa vie et sa relation avec Dieu grâce au père Pierre.
"Je devais me respecter moi-même"
Durant sa détention, Diaz a passé des diplômes, notamment de droit et de psychologie. Mais n’a jamais perdu de vue que le plus important était la dignité. "C’est une des leçons du père", souligne-t-il. Aussi quand, en fin de peine, on lui propose de recouvrer sa liberté à condition de plaider à nouveau coupable, il refuse. Vont ainsi s’ajouter dix années d’enfermement. "Mais je devais me respecter moi-même." En 2006, alors qu’il n’a jamais reconnu le crime, la justice américaine laisser Diaz sortir du pénitencier. "C’était tellement fort de voir Severino les pieds dehors qu’on ne pouvait parler", se souvient l’aumônier.
Six ans plus tard, toujours sans aveux, cette même justice l’a libéré totalement. Et lundi, avec le prêtre, il s’est promené dans Lodève, avec un petit tour dans la cathédrale Saint-Fucran, pour quelques prières.

http://www.midilibre.fr/2013/02/03/ex-taulard-a-new-york-il-retrouve-son-aumonier,637984.php

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