mardi 14 juin 2011

Bettencourt: "Ma fille n'est pas heureuse"

Les hostilités ont repris mais, dans cet hôtel particulier de Neuilly, le temps semble s’être arrêté. "Madame se prépare", prévient Benjamin, le majordome. Liliane Bettencourt, 89 ans, descend l’escalier aux bras de son infirmier, Alain. Brushing impeccable, pantalon gris, veste et foulard rose… Une prestance de star à l’ancienne. Une façon élégante de tendre la main et d’inviter d’un regard à passer au salon.
En maîtresse de maison, elle va piloter seule la séance photo. "Je ne croise pas les jambes, cela fait cruche"… "Il ne faut pas que je rie, le sujet est grave"… "Si vous insistez, nous pouvons aller dans cette autre pièce. Allons plutôt là-bas, dans la salle à manger, avec les arbres au fond"… "On vous a servi à boire, Messieurs? Je ne vois pas vos verres…" Une éducation d’un autre siècle. Son infirmier déconseille la station debout, Liliane Bettencourt restera pourtant dix bonnes minutes devant la desserte de sa salle à manger, appelant ses chiens, des teckels, à s’inviter dans le cadre. "Vous trouvez que cela va, ce foulard rose ?" Liliane Bettencourt s’amuse avec l’objectif.

"Un bain à la mauvaise température tous les jours"

Juste après, assise pour répondre à quelques questions sur l’affaire, elle va vite sembler lasse. Depuis mercredi, après six mois de trêve, les avocats de sa fille ont saisi le juge des tutelles de Courbevoie d’une demande visant à annuler le mandat de gestion confié à Me Pascal Wilhelm, l’avocat de la milliardaire. "Cela serait une folie que je me sépare de lui", prévient Liliane Bettencourt. "Ma fille n’est pas heureuse… Elle est très changeante. Elle aurait besoin de se confier à un psy compte tenu de ses problèmes psy… Vous voyez un psy vous-même?" interroge-t-elle.
Elle confirme avoir refusé, jeudi soir, de voir sa fille quand cette dernière s’est présentée dans le hall. "À quoi bon, pour se disputer encore? Vous comprenez, c’est fatiguant de recevoir quelqu’un qui est psychiquement un peu dérangé. Vous prenez des bains? Quand la température n’est pas bonne, cela ne convient pas non? interroge, déconcertante, Liliane Bettencourt. C’est ce qui m’arrive, un bain à la mauvaise température tous les jours. C’est très inconfortable."
Elle entend mal, il faut parler fort, ses proches ont l’habitude, mais, par moments, la mobilité de ses yeux bleus semble signifier aussi qu’elle comprend très bien. "C’est peut-être méchant de dire cela, mais si cette jeune personne, dit-elle en parlant de sa fille, voyait un psy, en qui elle aurait confiance, et qui l’inciterait à sortir d’elle-même, peut-être serait-elle plus heureuse…" Elle a prononcé cette phrase d’un trait. "Je veux terminer sur une note positive", corrige-t-elle. La rencontre aura duré une heure. La brouille avec sa fille semble, elle, durer depuis toujours.

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