mercredi 2 novembre 2011

"Marie-Christine Hodeau a véritablement vu arriver sa mort"

28 septembre 2009, à Milly-la-Forêt, dans l'Essonne. Marie-Chritine Hodeau, 42 ans, part comme elle en a l'habitude faire son jogging en direction de la forêt. Quelques minutes plus tard, à 9h10, elle contacte les gendarmes à l'aide de son téléphone portable, leur explique qu'elle vient d'être enlevée par un homme muni d'un couteau et qu'elle se trouve dans le coffre de sa Peugeot 106 dont elle donne le numéro d'immatriculation. Selon l'ordonnance de mise en accusation, dont TF1 News a eu copie, au bout de 2 minutes et 22 secondes, l'appel est brutalement interrompu.
D'importants moyens sont déployés pour retrouver l'assistante maternelle. A 10h40, un hélicoptère localise la voiture chez son propriétaire. L'homme qui vient de la conduire est le gardien, Manuel Da Cruz. Il est arrêté à midi. Le corps de Marie-Christine Hodeau sera découvert deux jours plus tard. Devant le juge, après avoir nié les faits, l'accusé expliquera l'avoir suivi, enlevé et attaché à un arbre avec un fil électrique, avant de repartir. Après avoir changé de voiture, il revenait dans la forêt. Constatant que sa victime tentait de s'enfuir, il décidait de l'étrangler. L'autopsie révèlera que la victime a été violée.
A l'époque, l'affaire avait relancé le débat sur la récidive et la castration chimique : Manuel Da Cruz avait en effet déjà été condamné en 2002 à 11 ans de réclusion criminelle pour l'enlèvement et le viol d'une adolescente de 13 ans. Sorti de prison en 2007 après avoir bénéficié d'une libération conditionnelle, sa peine était considérée comme purgée en 2008. Depuis, il s'était réinstallé à quelques encablures de la maison de la jeune fille, provoquant la colère de ses parents. Le procès de Manuel Da Cruz se tient jusqu'à vendredi devant la cour d'assises de l'Essonne.
TF1 News : Deux ans après le drame, qu'est-ce que la famille de Marie-Christine Hodeau attend de ce procès ?
Dominique Polion, avocat de la famille : J'ai le devoir et la tâche de défendre la mémoire de Marie-Christine Hodeau, qui était une femme particulièrement appréciée par sa famille, son entourage et son milieu professionnel. Les débats révèleront le terrible calvaire qu'a pu subir cette femme qui a véritablement vu arriver sa mort.
Mes clients souhaitent une réponse judiciaire adaptée à leur mesure de leur douleur et du drame. Je ne crois pas trahir quoi que ce soit en pensant que le parquet devrait requérir une peine exemplaire à l'audience. Ce dossier s'inscrit, comme vous le savez, dans un contexte de récidive. Mes clients considèrent que si des mesures avaient été prises à l'époque à l'encontre de Monsieur Da Cruz, peut-être que Marie-Christine serait encore parmi eux. Il est toujours très difficile de dire après coup que le crime aurait pu être évité. Mais ce qui est sûr, c'est qu'il y a eu une carence dans le suivi de cet individu.
Ce qui a été le plus choquant pour les proches de Marie-Christine Hodeau, comme pour beaucoup de monde, c'est de découvrir que suite à sa première condamnation en 2002 pour le viol d'une adolescente, Monsieur Da Cruz a pu venir se réinstaller près du domicile de sa jeune victime. Même s'il avait fini de purger sa peine, on peut comprendre que cela ait choqué.
TF1 News : Et qu'attendent-ils de l'accusé ?
D.P. : Non, de l'accusé la famille n'attend pas grand-chose puisque dans le cadre de l'instruction il ne semble pas qu'il se soit considérablement épanché sur ne serait-ce que de simples regrets.
TF1 News : Deux mois après son arrestation, Manuel Da Cruz a tenté de se suicider. A l'époque, il avait été dit qu'il avait laissé deux lettres, dont l'une adressée à la famille et dans laquelle il exprimait des regrets pour la peine occasionnée ?
D.P. : Pas du tout. Sauf erreur de ma part, ces lettres ne figurent pas au dossier. Peut-être ont-elles été écrites mais jamais elles ne m'ont été communiquées et jamais elles ne sont parvenues à la famille.
TF1 News : A l'époque, cette affaire avait vivement relancé le débat sur la récidive, la castration chimique. Débat qui a abouti à une nouvelle loi en mars 2010 qui prévoit notamment que, désormais, en cas de refus ou arrêt de leur traitement, les condamnés les plus dangereux pourraient être punis d'un retour en prison. Est-ce satisfaisant ?
D.P. : Si ce drame a pu contribuer à faire avancer un peu les choses, tant mieux. Maintenant, à l'époque, c'était une méthode assez classique que de rebondir sur ce type de drame pour venir animer un débat ou justifier la mise en place d'une nouvelle loi. D'ailleurs, la venue du ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux, aux obsèques de Marie-Christine Hodeau pour présenter ses condoléances au nom du gouvernement, avait déstabilisé, pour ne pas dire indisposé la famille.
Maintenant, l'arsenal législatif est-il satisfaisant aujourd'hui ? Nous avons désormais tous les outils nécessaires pour agir. En revanche, nous n'avons pas les moyens d'utiliser ces outils. Ma propre juridiction, celle d'Ivry, est noyée sous un nombre incommensurable de dossiers. Donc, la question du suivi des délinquants sexuels reste un problème. Nous l'avons encore vu à Pornic avec l'affaire de la jeune Laetitia.
TF1 News : Ferez-vous de ce procès, le procès de la récidive ?
D.P. : Je serai amené à en faire état dans mes observations car c'est ce qui anime pour partie mes clients. Mais, ce procès ne sera pas celui de la récidive.

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