vendredi 4 novembre 2011

Meurtre d'une joggeuse: une victime "savait" que l'accusé "recommencerait"

Face à la barre, elle raconte une nouvelle fois son calvaire avec Manuel Da Cruz : Morgane Vallée, 24 ans, a été violée dix ans plus tôt par l'homme jugé depuis mercredi par la cour d'assises de l'Essonne pour avoir enlevé, violé et assassiné une joggeuse en 2009.
Son récit est éprouvant. "J'avais les mains derrière le dos, les chevilles entravées avec ma culotte et mon soutien-gorge. J'étais toute nue. Je n'avais jamais connu la sexualité", souffle cette jolie jeune femme, aujourd'hui étudiante en pharmacie. Agée alors 13 ans, Morgane Vallée est séquestrée par Manuel Da Cruz, son voisin à Echilleuses (Loiret). L'homme la ligote, la frappe, l'emmène dans les bois et la viole. Arrêté, Manuel Da Cruz avait été condamné en 2002 à 11 ans de réclusion criminelle. Et puis, en 2007, Morgane Vallée apprend la libération conditionnelle de son violeur. "Je ne dormais plus, je ne voulais plus sortir de chez moi. Il avait dit qu'il reviendrait finir le travail". Face à elle, l'accusé ne bronche pas. Inexpressif, comme depuis le début du procès mercredi.

Elle a "tourné la page"
Manuel Da Cruz comparaît jusqu'au 8 novembre pour le rapt, le viol et l'assassinat en état de
récidive légale de Marie-Christine Hodeau, 42 ans, enlevée en septembre 2009 alors qu'elle faisait son jogging près de Milly-la-Forêt (Essonne). Le destin tragique Marie-Christine Hodeau, cette assistante maternelle qui avait réussi à échapper à son agresseur avant d'être à nouveau piégée et tuée par lui, avait bouleversé l'opinion et mobilisé le gouvernement sur la récidive. L'accusé encourt la réclusion criminelle à perpétuité avec une peine de sûreté de 22 ans.

En juin Morgane Vallée a publié un livre, "J'ai toujours su qu'il recommencerait" (Oh Editions). "Marie-Christine Hodeau n'a pas la chance de pouvoir expliquer ce qui lui est arrivé, de pouvoir soutenir le regard de l'agresseur. Je connais cet homme, comment il procède", dit encore Mlle Vallée. Elle "regrette" qu'"en France, la justice donne la part belle aux coupables plus qu'aux victimes", soulignant avoir depuis son viol il y a dix ans "changé de vie" et "tourné la page".
"Des pulsions"
Pour Me Dominique Polion, avocat de la famille de la joggeuse, "le calvaire subi par Marie-Christine Hodeau est quelque part similaire à celui vécu par Morgane Vallée", et ce témoignage "permettra peut-être à la cour d'assises de l'Essonne de peser à sa juste valeur la dangerosité" de l'accusé. Me Damien Brossier, avocat de l'accusé, estime au contraire que le témoignage à la barre de cette première victime pose un problème de "mélange des genres". Il estime que Manuel Da Cruz, qui "
réagit davantage à des pulsions qu'il ne réfléchit (...), serait peut-être plus inquiétant s'il était plus intelligent".
Le frère aîné de Marie-Christine Hodeau, Pascal, 48 ans, a ensuite parlé de sa soeur à la cour. "Ce qu'elle a fait au téléphone, ça représente sa personnalité. Je ne sais pas si beaucoup de personnes, dans la position où elle était, auraient eu ce réflexe" de téléphoner à la gendarmerie, a-t-il souligné. "Elle a élevé ma fille aussi, dont elle était la marraine. Pour la gamine, c'est quelque-chose de très dur à supporter, sa tante, elle représentait tout", a-t-il continué, très ému.

Aucun commentaire: