dimanche 29 janvier 2012

Ces buralistes braqués qui vont au travail la peur au ventre

la fin d’année 2011 a été chaude et très violente pour nous ». Jean-Pierre Teindas, le président de la chambre syndicale des débitants de tabac du Rhône sait de quoi il parle. Buraliste à Villefranche, il a lui-même été agressé à trois reprises, mais toujours à l’extérieur de son commerce.Quand l’actualité vient lui rappeler que sa profession est une des plus visées par les malfaiteurs, instantanément, il se retrouve projeté six ans en arrière. « J’étais avec mon fils de 20 ans juste devant mon portail. J’avais un cutter sous la gorge et mon fils, un marteau au-dessus de la tête ». Les braqueurs ne se contentent plus de surgir arme au poignet dans un débit de tabac, ils attaquent aussi dehors, là où les systèmes de sécurité sont inefficaces. Leur technique : suivre le commerçant jusqu’à son domicile. Pas caméras de vidéosurveillance ni de témoins gênants.
Dernière victime de ce type d’agression : Raphaël D., 25 ans, buraliste à Bron. Le 13 janvier, deux hommes l’attendent devant chez lui. Traîné dans son appartement, il est frappé à coups de crosse et de poing et dévalisé. Une séance très brutale qui lui laisse 17 points de suture et une trouille au ventre qui ne le quitte plus. « Je suis sous anxiolytique depuis ce jour. Même mon domicile n’est plus un refuge. La preuve, ils ont su me trouver. Pourtant je me méfiais et changeais de route tous les soirs pour rentrer chez moi ». Ce jeune commerçant a déjà subi en un an, trois vols à main armée et une tentative. Constat : la violence a grimpé à chaque agression.
Dans la même ville, le 25 novembre, un autre buraliste a été atteint d’une balle à l’abdomen. Un traumatisme qu’il a aussi du mal à évacuer. Comment retourner derrière son comptoir après vu la mort de près ? Pour Raphaël, c’est impossible. « Je viens tôt le matin. Dès qu’il y a des clients, je tremble et mon cœur bat plus vite. » Sa mère a pris le relais. Christian qui tient un tabac-presse depuis neuf ans à Montchat (Lyon 3 e) a eu plus de chance. Lui aussi a sa « petite » expérience des braquages. Trois en neuf ans. Le dernier en date : le 30 septembre. « Je remercie mon braqueur ! Il ne m’a pas frappé et est resté calme ».
Christian est fataliste. « Les braquages, on s’y habitue », dit-il. La violence, non. Et c’est bien cette escalade qui inquiète les policiers. « Si le nombre de vols à main armée est plutôt stable, les vols avec violence (couteau, bombe) ont bien augmenté », indique le commissaire Favre-Tissot, chef adjoint de la Sûreté départementale. Les malfaiteurs sont jeunes, inexpérimentés et paniquent au premier accroc. Cris et insultes pleuvent quand ce n’est pas plus grave. « Ils consomment beaucoup de stupéfiants, peuvent passer la nuit sur des jeux vidéo et braquer au petit matin. Ils sont dans le virtuel et ils obéissent à des pulsions ce qui est d’autant plus dangereux ». Leur cible ? Le tabac-presse du quartier où ils achètent leurs cigarettes. Après un petit repérage, ils se lancent, parfois avec les moyens du bord. Ils savent que les débitants de tabac restent un des rares commerces où on paie en liquide et où le butin peut être important. Comment lutter ? Accroître la sécurité du magasin ? « Bof, c’est du bla-bla, on est tous équipé, soupire le gérant de Montchat. Non, la meilleure protection, c’est que ces types fassent 20 ans de tôle ». Raphaël, le commerçant de Bron a pris sa décision. Il va vendre et quitter l’agglomération lyonnaise pour la campagne. « Dans la famille, on est des commerçants, j’aime mon boulot, mais je veux rester vivant ».
http://www.leprogres.fr/rhone/2012/01/29/ces-buralistes-braques-qui-vont-au-travail-la-peur-au-ventre

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